La Touraine au Xème siècle
Au milieu du IXème siècle la
Touraine est sous l'influence de la puissante famille des Adalard, Le Sénéchal Adalard est le second personnage de l'état Franc derrière l'Empereur
Louis I le Pieux, il réside souvent à
Loches.
Les invasions Normandes vont pourtant bousculer les positions établies. Le roi
Charles II le Chauve charge
Robert le Fort de pourchasser les Normands sut toute l'étendue de l'ancienne Neustrie dont il lui confie la tutelle.
Ses fils
Eudes et
Robert, qui deviendront rois tour à tour, amplifient leur tutelle sur la
Touraine, mais c'est le fils de Robert, le duc de France
Hugues le Grand, qui crée une situation nouvelle. Il installe, dans les années 930, son lieutenant
Thibault le Tricheur, déjà Comte de Blois, comme vicomte puis comte de Tours aux dépens des tenants du clan des Adalard.
Ce clan, outre la famille des Adalard, se compose des anciens vicomtes de Tours
Foulques le Roux (tige des
comtes d'Anjou) et
Atto (tige des
barons de Preuilly). Les
sires de Buzancais qui sont bien implantés à
Amboise sont leurs alliés.
Pendant une cinquantaine d'années, en fait du vivant de
Thibault le Tricheur, la
Touraine est épargnée par les conflits qui émaillent la transition entre les
Carolingiens et les
Capétiens.
Le suzerain de Thibault,
Hugues Capet (le fils de
Hugues le Grand) contrôle en fait partiellement
Tours grace à sa fonction d'abbé laïc de
Saint Martin de Tours.
A la fin des années 970, le fils de Thibault,
Eudes I de Blois, adopte une attitude plus aggressive vis à vis de
Hugues Capet et même du comte d'Anjou
Geoffroy I Grisegonelle. Auparavant neutre celui-ci devient un ennemi de
Eudes I de Blois et un allié fidèle de
Hugues Capet et de
Bouchard de Vendome.
C'est avec le fils de Geoffroy,
Foulques III Nerra, que la
Touraine devient le théatre d'une guerre qui va durer près 60 ans.
La lutte entre les Comtes de Blois et d'Anjou
Deux familles vont progressivement dominer toute la région. A l'Ouest les
comtes d'Anjou ont de profondes attaches en
Touraine, à l'Est les
comtes de Blois détiennent
Tours et même
Saumur,
Chinon et
Bourgueil. Après une cinquantaine d'année de coexistence pacifique les deux familles engageront une lutte frontale qui se terminera, pour la
Touraine, par la victoire des
comtes d'Anjou.
| PLANTAGENETS | Seigneurs de Touraine | Comtes d'Anjou |
Comtes de Blois |
| Comtes de
Vendome | Sgrs de Chateaurenault| Sgrs de Langeais | Sgrs d'Amboise |
| Barons de Preuilly | Seigneurs de l' Ile Bouchard | Seigneurs de Maillé (Luynes) |
Au début du IXème siècle les seigneurs sont encore dépendants du pouvoir royal, l'hérédité a beaucoup progressé mais n'est pas encore la seule règle de transmission des biens et pouvoirs.
La ville de
Tours présente une situation originale avec deux forts pouvoirs religieux (l'
archéveque et l'abbé de
Saint Martin de Tours) qui laissent peu de place à un pouvoir laïc.
En fait les ducs de France (les
Robertiens, futurs
Capétiens), accaparent l'important titre d'abbé laïc de
Saint Martin de Tours, ce qui leur préserve une place de choix dans la ville et sa région.
Les descendants d'Ingelger Sénechal de Touraine et vicomte d'Angers deviennent
comtes d'Anjou et accroissent leur domaine. Ils sont rattachés à la famille des Lambert et Garnier de Nantes et aux descendants du Sénéchal Adalard (de l'époque de
Louis I le Pieux), et c'est par là qu'ils sont implantés à
Loches,
Amboise et
La Haye.
Du coté des
comtes de Blois, le premier Thibault est aussi vicomte de Tours, sa famille est issue de l'
Anjou et de l'Ouest de la
Touraine (
Saumur,
Chinon,
Bourgueil). Ses possessions sont donc enchevetrées avec celles des
comtes d'Anjou.
Jusqu'au milieu du Xème siècle, les deux comtes sont sous la tutelle des
ducs de France, ce n'est qu'à la mort de
Hugues le Grand que
Thibault le Tricheur s'émancipe et mène une politique autonome, ainsi il s'empare des comtés de
Chartres et de
Châteaudun.
Les
comtes d'Anjou restent fidèles à
Hugues Capet le nouveau duc de France et Thibault ne cherche pas à les déstabiliser, ils agissent même parfois de concert dans l'Ouest du royaume de France.
Mais dans les années 980 la situation se dégrade franchement entre
Hugues Capet et
Eudes I de Blois. Le comte d'Anjou
Geoffroy I Grisegonelle, fidèle à son suzerain, se retrouve en conflit avec son remuant voisin
Eudes.
C'est surtout avec l'arrivée du fils de Geoffroy,
Foulques III Nerra à la tête du comté d'Anjou que le conflit prend un caractère particulièrement violent. A partir de 987 l'objectif de
Foulques puis de son fils
Geoffroy II Martel est d'enlever
Tours aux
comtes de Blois et au-delà de les chasser de
Touraine, cet objectif est atteint en 1044 avec la victoire décisive de
Nouy remportée par
Geoffroy II Martel.
Revenons à
Foulques Nerra, il s'oppose successivement aux
comtes de Blois Eudes I et plus tard à son fils
Eudes II, avec l'aide d'Aldebert de Périgord il s'empare de
Tours, mais il est mal accepté par les habitants.
Berthe de Bourgogne, la veuve de
Eudes I et mère de
Eudes II, épouse le roi de France
Robert II le Pieux en 996. Ceci complique singulièrement la tache de
Foulques Nerra qui doit abandonner
Tours devant la coalition du roi
Robert et de
Eudes II en 997.
En 1016
Foulques Nerra remporte une importante victoire sur
Eudes II à
Pontlevoy, cette bataille a marqué les esprits au
Moyen Age à cause du nombre important des victimes de ce combat.
Foulques Nerra a construit de nombreux châteaux-forts dans ses domaines, pour la
Touraine son objectif était d'enserrer de tous cotés la ville de
Tours et simultanément de sécuriser ses lignes de communications.
Ainsi les châteaux de
Langeais et de
Montbazon ont été construits dans les années 990, la forteresse de Montboyau (
Fondettes) a été construite en 1017, elle inquiètait beaucoup les habitants de
Tours, mais elle a été démantelée par
Foulques Nerra lui même à la suite d'un traité avec
Eudes II. Comme autres chateaux développés ou construits en
Touraine par
Foulques Nerra on peut citer
Loches,
Semblancay,
Loudun,
Moncontour,
Mirebeau,
Montrichard,
Sainte Maure,
Etableaux, le
Grand Pressigny et la
Tour du Brandon près d'Azay sur Cher.
Un autre point de fixation de la lutte est le point fort de
Saumur qui est gardé par un fidèle du
comte de Blois, Guelduin. Ce n'est qu'en 1026 que
Foulques Nerra parvient à s'emparer de la ville et du chateau. En contrepartie, Guelduin recoit la seigneurie et le château de
Chaumont.
C'est en 1034 qu'
Eudes II fait construire à
Tours un
pont en pierre sur la
Loire. Il se situait à coté de l'actuelle passerelle de
Saint Symphorien, et en période de sécheresse on peut encore en apercevoir certaines substructures dans le lit de la rivière.
Foulques Nerra est mort en 1040 et il a été enterré à l'
Abbaye de Beaulieu les Loches qu'il avait fondée.
La Bataille de Nouy (1044)
En 1044, le fils de
Foulques Nerra,
Geoffroy Martel remporte une victoire décisive à Nouy sur le comte
Thibault III de Blois qu'il fait prisonnier.
Pour prix de sa liberté Thibault doit abandonner définitivement la
Touraine au pouvoir des Comtes d'Anjou.
En 1049 ce même
Geoffroy Martel en conflit avec
Henri I assiège ce roi de France dans
Sainte Maure.
Geoffroy Martel a été excommunié pour les désordres de sa vie privée mais surtout pour le soutien qu'il apportait à Béranger de Tours alors que celui-ci était en conflit avec la Papauté.
Luttes féodales
| Seigneurs de Touraine | Sgrs de Chateaurenault| Sgrs de Langeais | Sgrs d'Amboise |
| Barons de Preuilly | Seigneurs de l' Ile Bouchard | Seigneurs de Maillé (Luynes) |
Après la mort de
Geoffroy Martel ses neveux se font la guerre pour s'approprier sa succession.
Geoffroy le Barbu est fait prisonnier par son frère
Foulques le Réchin qui le garde 28 ans dans un cachot du
château de Chinon.
Foulques le Réchin doit soumettre un à un les seigneurs locaux qui sont très soucieux de conserver leur autonomie. Il rentre en force dans leurs chateaux et domaines, ainsi à
Amboise,
Rochecorbon, l'
Ile Bouchard,
Maillé (Luynes).
En 1092,
Foulques le Réchin est abandonné de sa troisième femme Bertrade de Montfort qui rejoignit le roi de France
Philippe I. A la mort de ce dernier en 1108, Bertrade se retire au monastère de
Fontevraud.
Le fils de
Foulques le Réchin,
Foulques V le Jeune (1109-1142) réussit à controler complètement la
Touraine. Il reprend le controle de
Loches et de
Montbazon en 1118 et désormais les
seigneurs de Touraine l'accompagnent dans ses luttes à l'extérieur de la province.
Foulques V marie son fils
Geoffroy Plantagenet (il n'avait que 15 ans) à Mathilde de Normandie, veuve de l'Empereur d'Allemagne et héritière du duché de Normandie et du royaume d'Angleterre.
Geoffroy Plantagenet parvient à mater, en 1147, la rebellion de
Sulpice II d'Amboise, c'est une des dernières guerres féodales à l'intérieur de la Touraine.
Foulques V le Jeune part ensuite en croisade où il devient roi de Jérusalem.
A partir de cette époque la
Touraine, avec le
Maine et l'
Anjou, participe à l'extraordinaire épopée de l'
Empire Plantagenet.
En savoir plus sur les seigneurs de Touraine
La Féodalité
Conquête de la Touraine par Philippe Auguste
En 1202,
Tours est contrôlé par
Arthur qui est en conflit avec
Jean sans Terre.
Arthur va faire le siège de
Mirebeau en
Poitou, mais il est surpris, le 30 juillet, par une armée conduite par
Jean sans Terre et Guillaume des Roches et il est fait prisonnier.
Arthur est assassiné à Rouen en avril 1203.
Prise de Tours par Philippe Auguste
Jean sans Terre est condamné par la Cour des Pairs du royaume de France qui prononce la confiscation de ses biens. Dès mars 1203 Guillaume des Roches a rallié le roi de France
Philippe II Auguste avec la plupart des seigneurs Angevins et
Poitevins.
Le Lieutenant de
Jean sans Terre à
Tours, Hamelin de Roorte, s'enfuit de la ville. Pendant l'été et l'automne 1203, la ville change de mains à plusieurs reprises, alternativement contrôlée par les partisans de
Jean sans Terre ou ceux de
Philippe Auguste, Guillaume des Roches et
Sulpice III d'Amboise. Les deux parties de la ville, la
Cité et
Châteauneuf subissent incendies et déprédations.
Pendant ce temps
Philippe II Auguste s'empare de
Saumur et de
Loudun puis il établit une solide garnison à
Tours. La chute de Château-Gaillard en mars 1204 décante la situation, la
Normandie est désormais contrôlée par le roi de France qui peut alors se consacrer à la
Touraine, l'
Anjou et le
Poitou.
L'armée de
Philippe II Auguste est conduite par Guillaume des Roches et
Aimery VII de Thouars.
Philippe Auguste et ces deux chefs doivent mettre le siège des places de
Loches et
Chinon qui sont défendues respectivement par Gérard d'Athée et Robert de Turneham. Seul le fort avancé du
château de Chinon est conquis à la fin de 1204. Pendant l'hiver Guillaume des Roches reste devant le
chateau de Chinon tandis que Dreux de Mello poursuit le siège de
Loches.
Philippe Auguste revient en
Touraine au printemps de 1205 pour assister à la prise de
Loches puis à celle du
chateau de Chinon qui est alors défendu par Hubert du Bourg.
La conquête de la
Touraine entière est alors consommée.
Jean sans Terre renonce à cette province lors de la trêve du 26 octobre 1206, il renonce également à la Normandie, la Bretagne, l'
Anjou et le l'
Maine.
Evolution de la féodalité en Touraine
A la fin du XIIème et au début du XIIIème siècles le
comté de Touraine comprend huit Baronnies elles memes subdivisées en Chatellenies.
Les
Plantagenets puis les
Capétiens développent une organisation royale parallèlle à l'
organisation féodale destinée en fait à diminuer petit à petit le pouvoir des seigneurs.
Henri II Plantagenet met en place six Prévôts pour superviser la
Touraine. Ils dépendent du Sénéchal qui réside à
Angers.
A partir de 1204 la
Touraine s'intègre progressivement dans le royaume de France.
Philippe Auguste nomme Guillaume des Roches Sénéchal pour l'
Anjou, le
Maine et la
Touraine et lui accorde l'hérédité de cette fonction pour sa famille. La famille des Roches portera le titre de Sénéchal jusqu'à la
Guerre de Cent Ans. En 1213 le roi de France nomme Guillaume d'Azay comme Bailli Royal. Le Bailli est chargé de maintenir l'ordre public, mais aussi de faire rentrer les impôts. Il s'appuie sur cinq Prévôts à
Tours,
Chinon,
Langeais,
Loches et
Loudun (rattaché au baillage de Touraine).
le roi
Philippe Auguste insère la noblesse de Touraine dans son organisation militaire. Il accorde le statut de Chevalier-Banneret aux principaux seigneurs de la province. Un chevalier-banneret a le droit de porter sa bannière lors des batailles. Voici certains seigneurs qui peuvent porter leur bannière:
Sulpice III d'Amboise
Pierre Savary seigneur de
Montbazon et Colombiers (
Villandry)
Guillaume III de Pressigny
Barthélémy de Bossay
Barthélémy de l'Isle Bouchard
Josselin de Champigny
Jean d'Alluyes seigneur de Chateau la Vallière
Robert de Pernay
Robert de RocheCorbon
Hugues de La Haye
Hugues de Fontaines, seigneur de Rouziers
Eschivard II Baron de Preuilly
Guillaume et Herbert Turpin de Semblancay
Pierre Achard de Pommiers (près Chinon)
Le seigneur de Saint Michel sur Loire
Hugues Ridel seigneur d'Azay (le Rideau)
Guillaume seigneur d'Azay sur Cher
Dreux de Mello, Gouverneur de
Loches
Josselin II de Champchevrier
En 1292, le roi Philippe IV le Bel nomme Philippe de Beaumanoir, un juriste réputé, comme Bailli de Touraine.
Les
Plantagenets ne reprendront jamais le contrôle de la
Touraine même pendant la
Guerre de Cent Ans.
Découvrez la Guerre de Cent Ans :
1° période (1330-1380)
2° période (1380-1413)
3° période (1413-1453)